Devant la dernière coupe gagnée par Miss McKrown... [Libre]

Plus il y réfléchissait, et plus il songeait que ça n'était pas une bonne idée. Il savait bien pourquoi il avait refusé de remonter sur un balai pendant ces deux années. Il savait bien que s'il tentait le coup, il y avait un risque pour que "ça" se produise. Et il n'avait vraiment pas envie qu'il y ait des témoins pour en attester. Combien de fois s'était-il éveillé en sursaut, les premiers temps, comme il revoyait en rêve les derniers instants de son dernier match ? Les derniers instants où il avait été conscient, toujours...

Cela faisait quelques temps qu'il n'avait plus été visité par de tels cauchemars, et maintenant qu'elle lui avait proposé de reprendre la place que leur John McAllister cherchait à céder, ils revenaient à la charge. Il ne lui avait rien dit encore, et au fond, il espérait que ses craintes fussent infondées et qu'il n'ait jamais besoin de lui avouer ce qui le hantait. Debout devant la vitrine, les mains dans les poches, il gardait les yeux rivés sur la coupe qu'elle avait remportée. Parviendrait-il vraiment à participer de nouveau à un match sans manquer de perdre tout contrôle à l'approche d'un cognard ?

Mme Pomfrey lui avait pourtant conseillé dès le départ de reprendre les rennes au plus vite, de sorte que le cap soit plus facile à passer. Mais il avait refusé, et à présent, il voyait parfaitement où elle voulait en venir. Toutes ces questions qu'il se posait, il les aurait facilement laissées dans un petit coin de sa tête il y a deux ans, et il aurait tenté le coup, quelqu'en soient les conséquences, s'il avait décidé de le faire. Mais aujourd'hui, bien qu'une part de lui-même ne demande qu'à prouver à tous qu'il était toujours capable de garder les buts comme on l'en avait félicité auparavant, une autre partie de lui-même tremblait de peur à l'idée qu'à nouveau, un "accident" puisse se produire. La tactique mise au point par Eileen pouvait très bien avoir fait des émules... Elle avait parfaitement fonctionné la première fois, qu'est-ce qui empêchait d'autres équipes d'en profiter ?

Peut-être qu'il aurait dû demander à ce qu'on modifie ses souvenirs, de sorte qu'il oublie ces instants fatidiques qui avaient sonné le glas de ses années au poste de gardien... Peut-être. Mais jusque-là, il avait été trop fier pour passer l'éponge sur ce "qu'elle" lui avait fait, ça n'était pas pour en oublier la cause. Et aujourd'hui ? Ils s'étaient mutuellement pardonné leurs erreurs, et elle lui offrait une seconde chance d'obtenir la carrière dont il avait rêvé... Mais c'était un choix difficile, que celui de sciemment occulter une partie de ses souvenirs. Ce sont eux, finalement, qui forment ce que nous devenons, et les effacer ne signifierait-il pas altérer quelque peu l'homme qu'il était devenu ? Tout à ses réflexions très philosophiques, l'infirmier posa une main sur la vitrine, le front plaqué contre elle.

- Et toi, Eileen, tu ferais quoi à ma place ?

Dix heures du matin. Une matinée des plus normales. Samuel Eloray, jeune élève de sixième année à Serdaigle se levait avec le sourire. Il faisait son lit chaque matin, et obligeait les elfes de maison à prendre congés. Il ne fallait pas les torturer, ces petites bêtes, même si parfois, on ne refusait pas leurs aides, bien sûr, personne n'en dirait le contraire. Les elfes le félicitaient d'ailleurs de son excellent travail. Lit parfaitement fait, oreiller bien bombé .... Diz heures trentre-cinq. Le petit homme descendait tranquillement, et comme toujours, les escaliers allant au Hall d'entrée, comptant à chaque fois le nombre de marches. Un tic. Déjeuner à l'anglaise avec bacon, oeufs et toasts. Puis, il se dirigeait soit vers le premier cours de la journée, mais exceptionnellement, le professeur ayant une grosse bonchite, Oh mais quel malheur , les élèves n'avaient pas cours. Samuel regarda le panneau indiquant à quel étage il se trouvait. Il avait beau avoir une bonne mémoire, ce genre de choses , il ne s'en souvenait presque jamais.

Troisième étage. Ici, la salle des Trophées [allons droit au but ! ]. Le jeune homme n'avait jamais visité cet endroit, qui devait surement être fabuleux. Il en avait entendu parler de bouche à oreille. Allez, autant en profiter ^^. Il passait devant différentes salles, mais ne trouvait pas sa perle rare. Quand soudain ...

Et toi, Eileen, tu ferais quoi à ma place ?

Samuel fit volte-face et découvrit une silhouette, appuyé sur une vitre. A côté de lui, une sorte de trophées ou un truc dans le genre. Etant quand même choqué d'être appellé par un nom de fille, il fronça ses sourcils et, mit les mains derrière le dos, par signe de timidité.

« Monsieur ... moi je suis Samuel.»

Bien qu'il ne put le voir, le regard sombre de l'ancien serpentard se durcit. S'il y avait bien une chose qu'il détestait, c'était être pris par surprise, d'autant que ça n'arrivait guère. Pestant intérieurement contre lui-même et sa négligence, il se redressa, se recomposant un masque impassible, et se retourna pour faire face au jeune homme qui le regardait, mains derrière le dos et les sourcils froncés. Ses propres mains ayant regagné ses poches - par habitude sans doute - il resta quelques instants immobile, sans un mot, à détailler le jeune serdaigle, plissant légèrement le regard. Il l'avait déjà vu quelque part ce petit gars... Et la réponse lui parvint assez rapidement finalement, avant qu'il ne lui réponde d'un ton calme et assez froid, il fallait l'avouer.

- Monsieur Samuel... Eloray, n'est-ce pas ? Batteur de l'équipe de Quidditch pour votre maison si je ne m'abuse...

Il mourrait d'envie de lui envoyer quelque remarque cinglante, mais l'élève en question n'était pour rien à sa négligence, la prochaine frois, il devrait faire plus attention. Et puis une idée - quelque peu saugrenue, certes - lui vint en tête et il lui demanda.

- Je suppose que vous vous intéressez un minimum à l'actualité de ce sport, non ? Dites-moi... Que pensez-vous de l'équipe d'Ecosse, qui vient s'entraîner sur notre terrain régulièrement ?

Avoir un avis extérieur sur la situation ne serait pas du luxe à l'heure actuelle, et celui d'un élève en vallait bien un autre...

Samuel ravala sa salive doucement, et fixait le monsieur qui se relevait et se trouvait maintenant face à lui. Ses sourcils froncés lui faisaiant très peur, lui qui n'était pas habitué à une telle froideur, et Samuel recula un peu. Il commençait d'ailleurs à se poser des questions, très farfelues. Et si il lui lançait un Sort interdit ?! Samuel avait beau être en sixième année ... Son esprit gamin était resté et s'était bien installé pour quelques années encore. Le jeune garçon retroussait déja chemin pour partir découvrir d'autres monts et vallées inconnus quand son interlocuteur recommença à parler. La baarbe, lui qui voulait se barrer direct TT''. Monsieur Samuel... Eloray, n'est-ce pas ? Batteur de l'équipe de Quidditch pour votre maison si je ne m'abuse...

Son pied gauche encore en l'air, il se retourna pour se retrouver face à lui et, le sourire aux lèvres, il aquiesca ses paroles par un mouvement de tête de haut en bas. Affirmatif.

« Oui monsieur, c'est ... ça. Samuel Eloray, batteur de l'équipe de Quidditch de Serdaigle.»

Cet espèce d'interrogatoire l'offuscait quand même. Il savait presque tout de lui! A savoir, peut-être qu'il entretenait des relations amicales avec sa mère. Il espérait que non, ou bien en effet, il dévoilerait ses talents de batteur ! Okay, il était amateur, mais savait bien dans quel sens tenir sa batte ! Et toc. Samuel se doutait bien que cet homme avait déja terminé ses études, quoi que. Il aurait pu être en septième année. Je suppose que vous vous intéressez un minimum à l'actualité de ce sport, non ? Dites-moi... Que pensez-vous de l'équipe d'Ecosse, qui vient s'entraîner sur notre terrain régulièrement ?

... O_O... Equipe d'Ecosse ... Ils venaient à Poudlard ? Régulièrement ?! Mister Eloray n'en savait rien. Mais répondre par un non ne ferait qu'aggraver la chose, alors Samuel mentit. Et oui. C'était rare.

« Ecosse ... Heu ouais, ils jouent ... bien. »

Le Serdaigle , passant la main dans sa nuque, rougissait légérement. Il n'avait pas l'habitude !

Ah... Vu la réaction du Serdaigle, ce n'était pas un grand courageux, la peur se lisait dans son regard et il était déjà prêt à partir quand Ricardo avait pris la parole. C'était bien un mouvement de recul qu'il avait eu là ? Et il croyait quoi ? Qu'il allait le tuer sur le champ pour avoir surpris une phrase qui lui avait échappée ? Il était infirmier, non de non, son boulot c'était de soigner les gens, pas d'agraver leur état ! Quoique parfois, quand il s'agissait de Safu, ça tournait au drame, mais elle, c'était un cas particulier. Il devait avoir un minimum de politesse ce petit gars, vu que quand Ricky lui adressa la parole, il arrêta son geste (courage, fuyons, ah bah on se demandait pas pourquoi il n'était pas chez les griffs lui... quoiqu'il en connaissait une qui n'avait pas eu l'air d'avoir grand chose à y faire auparavant et pourtant...) et hocha la tête pour confirmer son identité, un grand sourire sur les lèvres. Un coup tétanisé de peur, un coup grand sourire, et là, c'était pas une pointe d'agacement ? Pas de chance Ricky, t'es tombé sur le benet de service...

Un instant, il se demanda quelles pensées farfelues traversaient l'esprit du jeune homme, qui resta songeur, perplexe, surpris, un moment. Et quand il finit par répondre, l'infirmier haussa un sourcil.

« Ecosse ... Heu ouais, ils jouent ... bien. »

Le doute de l'ancien Serpentard s'accentua quand Samuel commença à devenir écarlate et passa une main sur sa nuque. Un soupir passa les lèvres du jeune homme qui leva les yeux au ciel et rétorqua sèchement.

- Pas la peine de vous forcer, si vous ne les connaissez pas, c'était une question comme une autre, pour avoir un avis plus objectif... Pour votre gouverne, votre professeur de vol en est la capitaine, poursuiveuse de sa fonction.

Il leva une main qui frappa le verre au niveau du trophée, d'un petit coup sec, juste pour montrer au Serdaigle une preuve de ce qu'il avançait. Puis, remettant ses mains dans ses poches, il fit quelques pas pour s'éloigner avant de se retourner pour ajouter encore.

Vous n'avez rien à craindre de moi, je ne vais pas vous faire de mal, ça va à l'encontre de ma profession. Et à l'avenir, évitez de mentir, un première année vous grillerait à coup sûr.

« Vous êtes le concierge ? »

Un coup de massue sur le crâne n'aurait pas mieux stoppé l'infirmier dans son élan. Le concierge ? Evidemment, comme pour tous ceux qui avaient un jour fréquenté Poudlard, le visage ridé et hideux de Rusard s'imposa à son esprit. Oh non ! Il n'était pas concierge, non... Ricardo finit par se retourner pour de nouveau faire face à l'élève de Serdaigle, un pâle sourire étirant ses lèvres.

- Non, je ne suis pas le "nouveau" concierge, non. Désolé, vous aussi, vous allez devoir subir Rusard et Miss Teigne un moment encore... Infatigable celui-là...

Ca aussi, c'étaient de drôles de souvenirs, tiens... Les courses poursuites à travers les couloirs pour échapper au concierge et ramener Caril à son dortoir en douce avant de rejoindre les cachots du sous-sols. C'était souvent pas passé loin... Mais Ricky avait un avantage, il les sentaient arriver de loin, le vieux sadique et son chat irritable, bien avant d'entendre leurs pas. Ca lui avait sauvé la mise un bon nombre de fois. Pas toutes malheureusement, mais assez pour en être fier...
Un instant, l'ancien serpentard dévisagea Samuel, avant de lui demander, l'air légèrement perplexe.

- Vous êtes en quoi... cinquième, sixième année ? Ca fait combien d'années que vous jouez au Quidditch, M. Eloray ?

Ca ne faisait pas si longtemps, tout de même, qu'Eileen et lui avaient quitté la scène Poudlardienne... Les élèves devaient bien se souvenir un peu, au moins de la dernière année ? Quelque part, que le jeune garçon ne le reconnaisse pas blessait plus encore son amour-propre que les récents avoeux qu'il avait faits à la prof de vol... et qu'il s'était fait à lui-même d'ailleurs.

[Pour pas te bloquer plus Sam, je clôture, j'ai un cours à aller préprarer, je vais certainement être moins dispo ]

- Sixième année, Monsieur. Non, je ne joue pas au Quidditch depuis longtemps. C'est pour cela que je n'ai pas beaucoup de connaissances en matière d'équipe d'Ecosse, par exemple. Pourquoi cette question ?

Il s'ennuyait manifestement, ce môme, à feuilleter son livre de métamorphose devant lui. Ricky lui jeta un regard noir, mais ne renchérit pas. Après tout, c'était lui qui avait lancé la conversation, il n'était peut-être pas enclin au dialogue - comme lui d'habitude - ou il avait peut-être une occupation autrement plus intéressante qui l'attendait ailleurs.

- Pas beaucoup de connaissances en matière d'équipe d'Ecosse. Ni pour ce qui concerne les équipes de l'école manifestement. Bah... Ca n'a pas vraiment d'importance. Bonne journée M. Eloray.

Sans un mot de plus, il tourna derechef les talons et s'éclipsa. Tout ça ne l'avançait pas beaucoup à vrai dire... Il ne savait toujours pas quelle réponse apportait à Eileen...