Sentir l’empreinte d’une brise nocturne, entendre les murmures dénués de sens qu’elle produit, et se laisser aller à quelques frissons de bien être. Il n’en fallait pas plus pour satisfaire celui que l’on surnommait pourtant l’éternel insatisfait. Jarod Ralston n’appréciait guère la compagnie de ses semblables, d’ordre général, et faisait tout pour les éviter au cours des journées successives. Ce n’est que lorsqu’il était repus de méditation, et que la solitude tendait à lui peser lourdement, qu’il consentait à être dérangé par une tête fouineuse, et pouvait à l’occasion s’avérer être un compagnon de route de qualité. Là se trouvait certainement la raison qui avait poussé le choixpeau à faire de lui un Gryffondor, cinq ans auparavant, alors que tous, y compris lui même, attendaient Serpentard.
Cette journée était passé comme une lettre à la poste. Quelques cours, situations idéales pour le dessin, l’origami, et autres occupations tout à fait officieuses. Restaient maintenant les devoirs. Et ce n’est pas vers les minuit que Ralston allait se décider à les faire. Il irait en cours aussi cancre qu’il en était sorti la dernière fois, et cela ne le choquait pas plus que ça. Il travaillerait lorsqu’il serait au pied du mur. Le minimum syndical, une solution à tous les problèmes professionnels.
C’est ainsi qu’en cette soirée embrumée, notre intéressé avait délibérément désobéi au règlement officiel de l’école, et s’était rendu dans le parc de Poudlard, à l’affût d’un brin de tranquillité, qu’il imaginait n’être troublée par rien d’autre que le passage inopiné de quelques oiseaux fureteurs. Quelques balles de jonglage à la main, il cherchait un terrain propice à son entraînement. En tant qu’objets moldus, elles provoqueraient les moqueries de ses semblables, si jamais il osait en user dans la salle commune. Seuls quelques soupirs ironiques émanaient de Ralston, lorsqu’il y pensait avec un minimum de sérieux.
Les cheveux ébouriffés, sa cravate décalée, il ne ferait pas bonne impression. Pour un Gryffondor, il semblait un brin trop débonnaire et désintéressé. Il semblait qu’à la moindre marque d’adversité, il rebrousserait chemin, usant d’une lâcheté que sa maison démentait chaque jour. Le stéréotype ne lui collait pas à la peau, et il se vantait de n’appartenir honnêtement à aucun « clan ». Ceux de la brigade inquisitoriale pouvaient arriver, il ne les avait jamais craint. Le masochisme dû à l’adolescence prenait une part trop importante, chez lui, de toute évidence. Et le fait est qu’il ne semblait pas le réaliser, ou au contraire le réalisait trop bien !
Un mince sourire aux lèvres, il trouva refuge près d’un arbre multi centenaire, et s’y adossa négligemment. Là, il dégaina ses quelques balles, et débuta ce qu’il appelait sa « séance niaise et inintéressante ». La perpétuelle remise en question lui servait beaucoup, à l’évidence. Tant qu’il s’en satisferait, il ne réagirait pas.
C’est alors qu’un bruissement d’étoffes se fit entendre. Peu aux aguets, Jarod ne le ressentit que quelques secondes trop tard. Pris de court, il cessa instantanément ses jongleries, et scruta l’horizon. Il n’était pas sans savoir que la forêt interdite n’était pas loin, et que ce qui pourrait en sortir serait bien plus dangereux qu’une troupe de brigadier ou leur dictatrice elle même. Prêt à prendre ses jambes à son coup, il hésita un instant avant de se décider à signaler sa présence. Téméraire et plein d’assurance, il userait de ruse s’il le fallait, c’était un fait indéniable.
« Sors de là. Je ne suis pas d’humeur à jouer, ce soir. »
Une petite voix intérieure lui souffla qu’il jouait peut être un peu trop avec le feu. En ces temps troublés, qui sait quelle fureur extérieure pourrait lui tomber dessus ?