Qui a dit erreur?

Y’en a qui aiment ça. Euh... Des noms s’il vous plait ? A part la ô récemment célèbre Fanny. Et à part Avery. Oui je sais, ça devient lourd, mais que voulez-vous, Emily vouait une haine absolument absolue à Blackheart. Elle n’avait aucune raison valable sur laquelle elle puisse argumenter, certes, mais c’était comme ça. Il y a des choses qui ne s’expliquent pas. Bon, en l’occurrence, cela semblait évident, mais elle se refusait à l’accepter. Donc, à part Fanny et Avery, qui donc ? Personne à la connaissance d’Emily. Quoiqu’en fait... Amy Farmer... Et toutes les dindes gloussantes de son espèce. Il y avait toutes ces gamines, toutes ces filles qui n’espéraient que ce genre de déclarations. Peut-être parce qu’elles n’arrivaient pas à rêver à mieux. Et pourtant, mieux que « t’as un joli petit cul » c’était vraiment pas difficile. Il y a mieux à complimenter. Ça faisait beaucoup de monde à y réfléchir. Il y avait autant de filles stupides à Poudlard ? Pourquoi tu poses la question Em si tu connais la réponse ?

C’est sûrement pas les plus intelligentes qui apprécient, crois-moi.

Mais ça il devait s’en douter. Conclusion : on ne perd rien, mais alors rien du tout à ne pas être comme Hayden[ne] Monaghan. A moins d’être assez désespéré ou assez débile pour aimer les pots de colle gloussant avec un pois chiche à la place du cerveau. Il devait bien y en avoir pour aimer non ? Imaginez le nombre de vieilles filles dans le monde magique sinon. Bref, à moins d’être un imbécile fini, ce qui ne semblait pas être son cas, Basile ne ratait vraiment rien.

Silence. Elle aurait franchement mieux fait de se taire. Une gêne s’installa entre eux. Ou du moins, du côté de Basile. Elle avait apparemment posé la question qu’il ne fallait pas poser. En même temps, comment savoir que ça le mettrait mal à l’aise ? Et puis surtout pourquoi ? Pourquoi se laissait-il faire par Monaghan ? Il pouvait très bien lui dire d’aller se faire voir et de faire ça tout seul comme un grand.

Des photos. Ah. Ça expliquait tout. Il lui faisait du chantage. Du genre « si tu fais pas ce que je te demande, il est possible, voire même fort probable que ces photos tombent malencontreusement dans les mains de la mauvaise personne »... Plus les minutes passaient, moins Monaghan lui semblait sympathique, et plus Basile avait l’air d’une malheureuse victime du destin. Le destin portant Hayden pour prénom bien sûr.

Je vois. Le genre de photos dont on n’est pas forcément fier. Je comprends. Tu ne devrais pas te laisser faire.

Et dans un élan de compassion, Emily lui tapota amicalement l’épaule. Elle n’était pas une habituée des photos honteuses mais pouvait imaginer le malaise que ça pouvait engendrer. Un jeune garçon bourré pouvait faire bien des choses pas très glorieuses... Hum. BREF. On se comprend. Parlant de ça...

Parlant de ça, ce geste de compassion qu’avait eu Emily n’était pas passé inaperçu. Il avait été suivi d’un bruit sourd et elle avait cru reconnaître quelqu'un traversant le hall d’un air furieux. Elle en eut la certitude quand une ribambelle de jouvencelles se traina à sa suite, la bave aux lèvres, la langue pendante. C’aurait pu être pire. Mais ce n’était pas terminé. Deux des dindes n’avaient pas suivi le mouvement et s’étaient arrêtées devant Emily, les mains sur les hanches la regardant avec mépris.

T’es vraiment une garce Jones !
Si tu le dis, c’est que ça doit être vrai...

Emily leva les yeux au ciel. Elle ne les comptait plus ce genre de remarques auxquelles elle avait droit en permanence. Allez savoir pourquoi, certaines personnes étaient persuadées que dans l’histoire, Emily avait tous les torts. Et allez savoir pourquoi, ces personnes-là ne mesuraient pas plus d’un mètre soixante-cinq, étaient toutes du sexe féminin et voyaient toutes Marwin Wyrven comme un dieu vivant. La même fille attrapa fermement le bras de sa copine en lui balançant :

Allez viens Fanny, ne traînons pas avec les loosers.

Et elle l’entraîna avec elle, étrangement, du même côté que la horde de groupies précédente. Désespérant. C’en était désespérant. Finalement, Emily avait la réponse à sa question. Oui, il y avait vraiment autant de filles stupides à Poudlard. C’était pas difficile à trouver.

Désolée. C’est comme ça tout le temps. Mais... tilt c’était pas la fameuse Fanny ?

Après tout, la fille en question était brune. Okay, le fait d'être brune ne définit pas quelqu'un, mais si Basile n'avait que cette mince information pour reconnaître la personne, presque tout le monde pouvait être Fanny.


[Bon, dans un manque total d'imagination et d'inspiration, je savais pas quoi mettre. Alors j'ai fait des PNJs. Si ça te va pas... c'est pareil ]

Avouez qu’Emily aurait eu toutes les raisons du monde de se moquer de Basile. Se bourrer la gueule à ne plus contrôler ce que l’on fait, ne même pas se rendre compte qu’on est indécent, voire obscène et même carrément vulgaire. Donner l’occasion à des gens du même type que Monaghan dont la seule ambition est de détruire la vie des autres de profiter de soi. Et se laisser marcher sur les pieds, se faire avoir comme un débutant. Et surtout, le pire dans tout ça finalement, c’était le fait de ne même pas assumer ses propres conneries. Parce que pour se laisser prendre dans la ronde infernale du chantage, c’est qu’on a des choses à cacher. Et après tout, on aurait tendance à dire « bien fait pour lui », il n’avait qu’à pas forcer sur la bouteille ; il est bien connu que le rhum est une boisson indigne qui fait de l’homme le plus respectable un fripon de bas-étage. Et ça vaut aussi pour la vodka, le whisky, le gin et je ne vais pas vous énumérer tous les autres alcools que je connais ou je vais passer pour l’alcoolo de service et ce rôle est déjà pris. En fait, Emily n’avait pas vraiment de raison de se moquer de Basile, mais par contre, l’envie de lui foutre une claque pour lui faire prendre conscience de sa bêtise la démangeait.

Mais bien entendu, elle ne le fit pas. Tout d’abord parce que ce n’était pas son genre de distribuer des gifles pour un oui ou pour un non. Et que la personne (chronologiquement une seule, sinon j’aurais dit deux) s’apprêtant à émettre une objection aille se faire foutre. Ensuite parce que sans savoir réellement pourquoi, elle éprouvait une certaine compassion à l’égard de ce pauvre Basile. Peut-être parce qu’il n’était, en définitive, qu’un de ces nombreux ados inconscients qui se perdaient dans l’alcool pour la simple raison que c’était un phénomène de mode à leur âge et qui ne se rendaient compte que trop tard des conséquences désastreuses que cela peut avoir. Depuis quand Emily arrivait-elle à ressentir de la pitié pour ce genre de types alors qu’elle avait fait les frais de ces conneries d’ados puériles ? Et bien figurez-vous que dans toute cette histoire, Emily s’était fortement remise en question. Elle s’était dit que c’était de sa faute. Ce qui n’était pas entièrement faux d’une certaine façon. Et elle y avait cru, y croyait encore et y croirait sûrement encore longtemps. Elle savait que rien ne serait arrivé si elle n’avait pas été aussi butée et que sa part de responsabilité n’était pas que minime. Et tout ça déboulait sur une profonde culpabilité et une auto-haine (étymologie by Lalyne : se haïr soi-même) au plus haut niveau. Ce qui explique bien des choses, notamment ce besoin de s’infliger une punition ou encore cet élan de pitié envers Basile.

Ça serait bien en effet...

Sans pouvoir vraiment expliquer pourquoi, elle sentait que ça ne serait pas très efficace. Après tout, s’il n’avait pas été capable de résister face à Monaghan, il était possible, voire même très probable, qu’il cède à nouveau. Il fallait tout simplement qu’il assume ses actions, quelles qu’elles aient été, et tant pis si ces photos faisaient le tour de Poudlard. Parce qu’il était évident que de toute façon, tout le monde serait plus ou moins au courant un jour. Ben oui, il était de renommée publique qu’un être humain entre onze et dix-huit ans était de nature curieuse et ne savait pas tenir sa langue (le genre : « je vais te dire un truc qu’on m’a raconté, mais il faut que tu ne le répètes à PERSONNE, je n’ai pas le droit de le dire »). L’adolescent moyen quoi. Et en particulier à Poudlard où la pire des cancaneries était organisée. Et où tout se déformait dès que ça commençait à se répéter, évidemment sans embellir les choses, bien au contraire... Alors oui, il serait sûrement sujet à quelques rumeurs désagréables, mais au moins il serait libéré de l’emprise de son cousin. Et puis tout à fait entre nous, ça ne ferait pas de mal à Emily qu’on s’intéresse un peu à d’autres.

La fameuse Fanny donc, s’éloignait, accrochée au bras de l’imbécile qui l’avait traitée de garce. Pourquoi ça ne l’étonnait pas que cette fille fasse partie des gamines écervelées de Poudlard (= groupe officiel, toutes maisons confondues, pourrait presque constituer une nouvelle maison à lui tout seul) ? Tout simplement parce que pour se faire avoir par des « compliments » aussi dégoûtants que ceux qu’elle avait entendus venant de Monaghan, il fallait vraiment qu’il lui manque une case. Une case de la taille d’un cerveau. Approximativement. Emily s’étonna de la réaction de Basile, qui avait carrément crié à travers tout le hall, faisant se tourner par mal de regards vers lui pour s’intéresser à la suite de la conversation.

Si, c’est mon petit ami.

Pauvre fille, tu n’imagines même pas à quel point je te plains et je te trouve stupide à la fois. Mais honnêtement, ça étonnerait beaucoup Jones que Monaghan ait la même définition de leur relation d’après ce que lui en avait dit Basile. Elle aurait plutôt qualifié ça (toujours dans la même optique) d’un « coup à se faire ». Ça va, ne la regardez pas comme ça, elle aussi sait être vulgaire quand elle le veut.

Quand Basile se remit à parler, un lourd silence s’installa autour de lui. Personne n’osait prononcer un seul mot. Il aurait été difficile d’en placer une au milieu d’un si beau discours. Sans ironie aucune. C’était dit avec une telle désinvolture, avec un tel je-m’en-foutisme que ça en devenait comique. Emily, qui était restée légèrement en retrait – être encore une fois au centre d’une manifestation de commérages, non merci – dut pincer les lèvres pour cacher le sourire incontrôlable qui voulait venir fendre son visage. Elle tenta vainement de reprendre son sérieux quand il s’adressa à elle.

Je crois n’avoir rien oublié. Si ?

Réprimant un éclat de rire, elle s’avança vers eux. Il était évident que de toute façon, il lui faudrait participer à la conversation, alors autant le faire correctement. Elle jugea Fanny du regard et fit mine de réfléchir, à un éventuel détail qui lui aurait échappé. Après tout, autant en profiter pour se venger un peu... Lançant un coup d’œil amusé à la Gryffondor, elle se tourna vers Basile.

Si. Tu ne lui as pas dit où ils avaient rendez-vous. Troisième étage non ? C’est là qu’il retrouve ses garces d’habitude, je crois.

Aucune idée de la véracité de cette information, mais ça faisait toujours du bien à balancer. Et à en juger par l’expression furieuse de Fanny, elle avait visé juste.

Au départ, Emily était plutôt réticente à l'idée de participer à cet étalage de vérité sur Monaghan et à la déception que cela provoquerait chez ladite Fanny. Parce qu’il était évident que Fanny serait forcément déçue. Etant donné du caractère presque divin qu’elle imputait à Monaghan, elle risquait de tomber de haut lorsqu’elle se rendrait enfin compte qu’il la menait en bateau, comme il le faisait avec toutes les filles avec qui il sortait ou était sorti ou les deux en même temps. Et apparemment, la pauvre Fanny était persuadée que Hayden était fou d’elle et qu’il ne vivait que par son sourire et qu’elle était magnifique et... toutes les conneries qu’il lui avait balancées quoi. Réveille-toi ma fille ! Ils disent TOUS ça ! Et après tu te retrouves avec des cornes de cocue sur la tête et tout le monde qui te montre du doigt ! Okay zen, rendors-toi Mily on a compris. Tous des connards ! Chut on a dit !

Emily donc, ne voulait pas se mêler à la conversation. Déjà parce qu’elle savait le mal que ça allait faire à cette pauvre fille d’ouvrir les yeux sur les actes de son « petit-ami » comme elle disait. Elle savait exactement la sensation de vide et de dégoût de soi-même que l’on pouvait éprouver. Expérience oblige. Ça allait lui briser le cœur. Si tant était qu’elle ait un cœur. Parce qu’à première vue, on ne dirait pas. Enfin, c’était pas non plus comme si elle était folle amoureuse de Monaghan, à tous les coups, ils se bécotaient (faute de dire qu’ils sortaient ensemble) depuis une semaine maximum. Ensuite, Emily ne tenait pas spécialement à se faire remarquer en remettant une gamine de quatorze ans à sa place. Elle avait assez été le centre de l’attention, elle n’avait vraiment pas envie d’y retourner, et surtout pas de son propre gré. Mais Basile l’y avait attirée sans qu’elle puisse l’en empêcher. Alors, à être jetée dans la fosse aux hippogriffes, autant se battre avec la classe d’un Gryffondor. Seulement à force de se battre, on finit par tomber.

Puis quant à elle, on ne se demande pas pourquoi elle raconte n'importe quoi !

Premier coup bas. Qu’Emily encaissa sans rien dire, serrant à peine les dents. Ce genre de remarque était lourde de suggestions mais ça ne la touchait pas plus que ça. Elle était pleinement consciente que ces gamines ne savaient même pas de quoi elles parlaient. Forcément, elles étaient comiques avec leurs têtes de vierges effarouchées et leurs expressions outrées, comme si toucher à Hayden Monaghan revenait à blasphémer tous les saints (holy). Elles devaient vraiment avoir un énorme trou à l’endroit où se situait normalement le cerveau (holey). Ça l’amusait carrément de voir à quel point le niveau intellectuel de la sorcière moyenne entre onze et seize ans pouvait être bas.

On sait tous très bien que depuis ta rupture avec Marwin, tu n'as plus qu'une envie, c'est que tout le monde soit aussi triste que toi ! Ouais, t'es juste jalouse voilà tout !

Quoi ?!

Ça lui avait échappé. Elle arrivait à peine à croire ce qu’elle venait d’entendre. Qu’est-ce qu’elle savait de la tristesse ? Qu’est-ce qu’elle savait du malheur ? Emily avait bien envie de lui coller l’évidence devant le nez en la trainant devant son « copain » qui devait sûrement être en grande partie de jeu de lèvres avec une gamine à la cervelle aussi émaciée que cette Fanny. Et là, on reparlerait de la tristesse. Et elle verrait que s’il y avait bien une chose qu’Emily ne souhaitait à personne, même pas à toutes ces dindes qui peuplaient Poudlard, c’était de ressentir la même chose qu’elle.

Ce simple mot d’incrédulité sorti involontairement entre ses dents avait apparemment attiré un peu plus de gens autour d’eux qui semblaient intrigués par cette petite altercation au milieu du hall. Emily semblait maintenant lutter contre l’emprise d’un rire nerveux.

Depuis que Jones est sortie avec Marwin elle se croit au-dessus de tout le monde !

Quelle conne ! Il n’y avait pas d’autre mot. Cette Fanny n’était qu’une petite conne. A croire qu’elle n’avait que le mot « Marwin » à la bouche. C’était limite si on ne se demandait pas ce qu’elle foutait avec Monaghan, qu’elle le prenne son Marwin si elle le croyait si parfait ! Qu’on lui foute la paix avec Marwin Wyrven ! Elle n’avait jamais rien demandé à personne à ce qu’elle sache. Qu’on la traite de garce, ou d’autres insultes bien moins descriptibles tant la vulgarité était de mise si on voulait, elle s’en fichait, mais qu’on n’insinue pas qu’elle puisse retirer une quelconque vanité à être sortie avec Marwin. Dans une pulsion, Emily approcha sa main de sa poche, prête à lui faire regretter ce qu’elle venait de dire, mais l’intervention de Basile la ramena sur Terre et elle abandonna l’idée d’attraper sa baguette.

Soudain, l’attention rebascula sur le problème originel, à savoir la vie sentimentale mouvementée de Hayden Monaghan et loin de chagriner Emily, cela lui permit d’essuyer aussi rapidement que discrètement les larmes de rage qui lui étaient montées aux yeux. Basile en profitait pour amuser la galerie et se retrouver au centre des regards, ce qui semblait le ravir. Il avait l’air parfaitement à l’aise et au comble de la joie à clamer haut et fort l’emploi du temps de son cousin. Pour quelqu'un qui cédait au chantage et craignait les répercutions de sa déloyauté, il cachait plutôt bien son jeu. Quand Monaghan saurait – car vu le nombre de personnes présentes dans le hall, il le saurait forcément – que Basile balançait sa vie privée à qui voulait l’entendre, il ne serait certainement pas ravi. Les fameuses photos risquaient de faire le tour de Poudlard dans les plus brefs délais.

Fanny, elle, ne semblait pas se réjouir de toutes les révélations qu’elle venait d’encaisser et surtout du nombre d’étudiants qui apprenait tout ça en même temps qu’elle. Et bien sûr, même si elle faisait tout pour montrer le contraire, le doute était en train de l’envahir. Parce qu’on n’est jamais sûr de rien. Emily ne put résister à asséner le coup de grâce. Un besoin imminent de vengeance se faisait ressentir.

Alors, tu te crois au-dessus de tout le monde toi aussi ? siffla-t-elle sur un ton sarcastique, ses yeux humides lançant des éclairs, t’as envie que tout le monde soit aussi triste que toi ?

Ç’avait apparemment suffi. Après un dernier regard plein de haine, Fanny avait attrapé fermement le bras de sa copine et leur avait tourné le dos, s’éloignant la tête haute vers, Emily en était certaine, la salle des trophées. Probablement rassasié en potins pour le reste de la journée, le petit attroupement qui s’était formé autour d’eux – pour ne pas dire la meute de vautours – se dissipa lentement. Et Emily se retrouva seule face à Basile dans un silence pesant.

Fanny était partie, le troupeau d’étudiants était parti, il ne restait plus que Basile et elle, plantés en plein milieu du hall. Eux deux et un putain de silence qui les oppressait. Elle arrivait à peine à croire ce qui venait de se passer. La façon dont elle s’était comportée avec cette gamine qui, à l’heure qu’il était, devait être en train de tomber de son petit nuage. Une longue chute avant de s’exploser sur le pavé de la désillusion, le tout suivi d’une descente aux Enfers. Elle ne savait que trop bien ce que devait ressentir la jeune fille en cet instant. En fait, c’était même pire, elle savait bien plus que ce que Fanny ne pourrait jamais ressentir. Parce que Fanny n’était sortie pendant quatre ans avec Monaghan, elle ne lui avait jamais dit d’aller se faire foutre et il ne lui avait pas révélé qu’il la trompait en la regardant bien dans les yeux. Ce genre de tuile énorme, ça ne pouvait tomber que sur une seule personne.

Mais même, ce n’était pas une raison pour être aussi dégueulasse avec elle. Après tout, puisqu’elle savait ce que ça faisait, elle ne pouvait pas souhaiter que quelqu'un d’autre ressente la même chose. Elle n’arrivait plus à comprendre ce qui avait pu lui passer par la tête pour qu’elle puisse participer à ça. Elle n’avait jamais voulu que quiconque connaisse ce genre de sensation. Même ces insupportables dindes gloussantes au comportement plus que puéril. Alors pourquoi s’était-elle acharnée sur Fanny elle aussi ? « Depuis que Jones est sortie avec Marwin, elle se croit au-dessus de tout le monde ! » Ah oui, voilà... La vengeance, tout simplement. Y’en avait marre que ça soit toujours les mêmes qui en prennent plein la gueule. Mais bon, peut-être que l’esprit de vengeance avait pris un peu trop le pas sur elle. Même si Fanny avait été pire qu’infecte, elle n’aurait sans doute pas dû être aussi méchante... Emily, en train de culpabiliser ? Ben oui, on est stupide jusqu’au bout ou on ne l’est pas. Et pour Emily, ça va jusqu'au bout et même plus loin encore.

Pendant qu’Emily se reprochait d’avoir en partie provoqué l’état de lamentation dans lequel devait se trouver Fanny, Basile, lui, semblait se rendre compte des conséquences que toutes les histoires sur Monaghan qu’il venait de conter à qui voulait l’entendre allaient avoir pour lui. Les retombées risquaient d’être difficiles à encaisser. Par « retombées », entendez : les regards critiques ou moqueurs des autres quand les photos actuellement entre les mains de Monaghan seraient distribuées à travers tout le château. Il risquait d’avoir droit à des commentaires désagréables et pire, des critiques muettes pendant... deux semaines. Trois si lesdites photos étaient vraiment compromettantes. D’après Basile, c’était le cas, mais on ne pouvait pas dire qu’il avait un point de vue très objectif ou externe. Mais loin de s’attarder dans ses pensées déprimantes, il rompit rapidement le silence opprimant, éloignant ainsi Emily de son élan de culpabilité prononcé.

C'est vraiment pathétique de s'en prendre à toi de cette façon sans te connaître. Juste parce que t'es sortie avec Wyrven. Je ne vois même pas en quoi ça les concerne d'ailleurs ... ni en quoi ça a un quelconque rapport avec mon cousin.

Emily leva enfin les yeux vers le Serdaigle et croisa un regard plein de compassion. Si elle avait un peu – okay, beaucoup – moins de fierté et que le geste ne paraissait pas déplacé, elle se serait jetée dans ses bras pour pleurer à chaudes larmes. Seulement voilà, étant donné qu’ils ne se connaissaient pas vraiment, le geste aurait paru déplacé et Emily était bien trop pleine d’orgueil. Orgueil qui était, en fait, la véritable source de tous ses problèmes. Elle tenait beaucoup trop à sa dignité pour accepter de montrer qu’elle était loin d’être aussi forte qu’elle le prétendait. De peur qu’on en profite pour s’acharner encore plus sur elle peut-être... Mais franchement, est-ce que ça pouvait être pire ? ... A voir. Toujours était-il que sa fierté lui interdisait d’exploser en larmes ou de baisser la tête à nouveau. Alors, elle renifla péniblement une dernière larme qui menaçait de rouler sur sa joue et le gratifia d’un faible sourire plein de reconnaissance.

Merci... C’est gentil...

Oui, c’était vraiment gentil. De ne pas la juger pour ce qu’elle avait pu faire dans sa vie. De trouver que les gens qui agissaient ainsi – alias soixante-douze pourcents des élèves de Poudlard – étaient « pathétiques ». Ça rassurait, en fait, d’entendre de la bouche de quelqu'un d’autre que ces filles avaient un quotient intellectuel à peine plus élevé que celui d’un troll des montagnes... et encore, un troll particulièrement débile alors. Quant à la fameuse hypothèse Marwin-serait-en-fait-la-victime, elle évitait de s’y intéresser, parce qu’elle savait déjà où la réflexion allait la mener. A savoir que oui, Marwin était la victime, mais en fait, plus tant que ça... Vous voyez de quoi je veux parler.

Ça pourrait paraître étrange, sachant qu’elle ne le connaissait pas etc., mais Emily ressentait de la sympathie pour Basile. Et pas seulement parce qu’il venait de lui dire quelque chose qui soulageait un peu sa douleur, même si ça jouait un rôle plus qu’important. Mais tout simplement parce qu’il avait l’air de quelqu'un de profondément gentil. Qui essayait de jouer les indifférents, mais qui en fait, était touché par ce qui lui arrivait, et même, par ce qui arrivait aux autres... Emily aurait aimé pouvoir en dire autant. Elle avait l’impression d’être tellement égoïste en ce moment qu’elle ne pouvait pas s’imaginer s’intéresser aux problèmes des autres. Pourtant, n’était-ce pas exactement ce qu’elle était en train de faire avec Basile ? Ouais, mais de là à ce que son cerveau embrumé s’en rende compte...

Je suppose que maintenant ça va être dur de convaincre mon cousin ... Je peux te demander quelque chose Emily ? Si jamais tu tombes sur ces photos... je te serais reconnaissant de ne pas rire. Je pense être assez puni comme ça. Bien sûr, je ne serais pas là pour vérifier mais...

Un sourire compatissant passa sur les lèvres de la jeune fille. Elle ne connaissait Monaghan que de réputation et ne se fiait pas aux rumeurs qui circulaient dans les couloirs du château – ça serait le comble – mais elle doutait en effet qu’il apprécie que ses « copines » soient au courant de ses activités infidèles. En fait, elle était même certaine que lesdites photos compromettantes pour le Serdaigle feraient très rapidement le tour de Poudlard. Et franchement, elle espérait ne pas avoir à tomber dessus. Elle ne tenait pas à voir ce qu’il pouvait bien y faire, ça ne l’intéressait pas. Alors se moquer de lui... Non, et puis elle savait trop bien ce que c’était que d’être montré du doigt. Elle ne pourrait pas lui faire ça.

Il n’y a rien de drôle... Et j’ai franchement pas envie de me moquer de toi...

Elle marqua une pause, puis rajouta :

T’inquiète pas, ça devrait se dissiper assez vite... Et on s’y fait à la longue.

Ouais enfin, vu ta tête, Em, on peut pas dire que ça te réussisse... Chut. Et de toute façon, ça n’était pas comparable. Les gens allaient jaser sur ces photos pendant quelques temps, plus ou moins longtemps suivant leur degré de ridicule, puis ça se tasserait, les gens se lasseraient et ça ne serait plus qu’une histoire qu’on lui renverrait dans la figure s’il se retrouvait dans le même état. Mais c’était déjà arrivé à d’autres et ils avaient survécu. Ce n’était qu’un dérapage d’adolescent, qui serait vite oublié. Et c’était tout ce qu’elle lui souhaitait. Qu’on oublie rapidement tout ça. Mais avant qu’ils oublient, il fallait que ça commence. Ce qui ne saurait tarder. Alors avant qu’il soit le centre des moqueries, autant lui offrir son dernier moment de répit.

Ça te tente une Bièraubeurre ? Y’a rien de tel pour oublier ses problèmes le temps d’une choppe.



[Je savais pas trop comment conclure, c’était soit ça, soit partir chacun de son côté mais bon... c’est pas marrant ^^]